Si l'état social tend à dérégler le rapport entre la puissance et le désir, et à "illimiter" le second, il faut à un moment attacher l'être qui s'aime à une puissance qu'il ne puisse séparer de soi et qui ne rencontre pas d'opposition (c'est pourquoi la toute-puissance de Dieu est un attribut autant sinon plus fondamental que sa bonté). Sans cela, puissance et désir restent fondamentalement disproportionnés. La seule puissance capable de retenir l'amour de soi d'un être dont le désir s'est ouvert à l'infini (par le mouvement de son imagination et de sa réflexion) de se retourner contre soi, c'est celle de l'auteur de mon être.
En somme, la croyance en Dieu de Rousseau ne me paraît jamais relever d'un registre discursif de la preuve (il est tout au contraire sceptique); elle est occasionnellement présentée comme une condition de la vertu (mais je ne crois pas qu'il regarde véritablement comme impossible qu'un athée agisse de façon vertueuse); plus fondamentalement, elle est regardée comme ce qui seul conserve la bonté naturelle d'un être dont le sentiment de l'existence est expansif.
Christophe Liwin
I agree compeletely with Christophe that belief in God is a precondition of virtue. I also am inclined to believe that the expansiveness of the sentiment de l'existence can tend to destroy bonté naturelle, although I am not quite sure about how belief in God would preserve it. In any event, what Christophe has shown is that nice things would follow if God does exist. I am the last person who would deny this. What he has done is to show that Rousseau regards belief in God as useful; I don't see that he has given any reason to accept that Rousseau regards such belief as true. From the beginning to the end (the First Discourse to the Reveries) Rousseau shows that he thinks that there are truths that are dangerous to happiness.
Christopher Kelly